Prévenir les incendies catastrophiques

Les porcs et les poules en particulier ne veulent souvent pas quitter l’étable, se regroupent voire se précipitent dans les flammes pour fuir.

Huit cents porcs sont morts misérablement à Gossau (SG) le 8 mai dernier. Ce n’était malheureusement pas un cas isolé. Trop d’animaux périssent dans des incendies parce que des dispositions légales claires font défaut et que la Confédération et les cantons se renvoient la balle.

Dr ing. agr. EPFZ Pius Odermatt, Responsable du Domaine Politique PSA

Des incendies d’étables dévastateurs se produisent régulièrement en Suisse. En décembre 2023, cinq cents bovins ont perdu la vie à Bottens (VD). Pour lutter contre cela, la Protection Suisse des Animaux PSA a rédigé des fiches techniques sur la prévention des incendies. Mais celles-ci ne parviennent pas chez tous les éleveurs. De plus, l’application des recommandations est facultative et implique des surcoûts que certains éleveurs rechignent à assumer, finissant par accepter de potentiels incendies.

Un urgent besoin d’agir

Il est donc urgent d’agir au niveau légal afin d’éviter des tragédies et de protéger les animaux. Des prescriptions légales plus strictes et des contrôles officiels doivent garantir un sauvetage des animaux aussi efficace et rapide que celui des humains.

La PSA a appris que l’Association des établissements cantonaux d’assurance incendie (AEAI) travaille à la révision des prescriptions suisses de protection incendie, qui devraient entrer en force en 2026. Malheureusement, cette révision touche d’abord la protection des personnes. Celle des animaux en est exclue. En janvier 2022, l’AEAI avait même informé par lettre l’Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires (OSAV) de cette décision. Elle se justifie en alléguant que la promulgation d’éventuelles prescriptions en la matière incombe aux services administratifs fédéraux responsables du bien-être des animaux.

Après plus de deux ans, l’Office fédéral n’a pas répondu à cette missive. Ainsi, dans la révision des normes en question, la protection des animaux est piégée. Et comme les nouvelles prescriptions de protection incendie doivent déjà entrer en vigueur en 2026, bien du temps a été perdu pour l’élaboration de normes spécifiques aux animaux.

Un postulat est déposé

Face à cette lacune de la loi, la Conseillère nationale Anna Giacometti (PLR, GR), soutenue par la PSA, a déposé un postulat lors de la session de printemps. Celui-ci demande au Conseil fédéral d’examiner l’introduction de prescriptions anti-incendie spécifiques aux étables. Mme Giacometti allègue que la prévention contre les incendies doit être prise en compte de manière appropriée dès la planification des constructions et installations techniques ainsi que dans les exploitations existantes et, le cas échéant, être adaptée. Il existe aujourd’hui des solutions pour les étables, avec des détecteurs de feu et de fumée ainsi que des installations sprinklers.

La panique empêche la fuite

Les porcs et les poules en particulier ne veulent souvent pas quitter l’étable, se regroupent voire se précipitent dans les flammes pour fuir.

Mme Giacometti demande aussi de prendre en compte le comportement spécifique des espèces animales en cas d’incendie. Les porcs et les poules en particulier ne veulent souvent pas quitter l’étable, se regroupent voire se précipitent dans les flammes pour fuir. Il y a lieu de tenir compte de ces conditions par des mesures suffisantes contre les incendies et en planifiant des voies d’évacuation adéquates. Outre l’introduction de prescriptions spécifiques, un contrôle supplémentaire doit être effectué par un office ou un service doté des compétences techniques requises.

La Confédération renvoie la balle aux cantons

Le Conseil fédéral n’est pas de cet avis et recommande au Conseil national de rejeter le postulat. Dans sa position du 24 avril 2024, il allègue que la compétence d’édicter des prescriptions dans ce domaine est cantonale. Au vu des incendies récurrents, il est très discutable que le Conseil fédéral s’en remette aux cantons. La PSA est nettement d’avis que la Confédération est compétente en la matière et doit veiller, dans l’Ordonnance sur la protection des animaux, à ce que soient prises des mesures de protection ad hoc contre les incendies.

Avec le soutien de Peter V. Kunz, professeur en droit et membre du Comité central de la PSA, celle-ci fournira aux parlementaires des arguments juridiques et techniques expliquant pourquoi le postulat Giacometti doit être mis en œuvre très rapidement. Car les incendies comme celui de Gossau ne doivent plus faire de tristes gros titres.